L’huile d’olive mieux que la cocaïne
Cette huile frelatée fait souvent son chemin jusqu’à nos rayons ; ainsi en Grande-Bretagne un haut fonctionnaire a déclaré que «les filières criminelles s’éloignent de la drogue car la contrefaçon [aux denrées alimentaires] encourent des peines de prison bien moindres. 10 ans et plus pour la contrefaçon de médicaments, contre moins de la moitié pour la fraude alimentaire ». Il confirmait ce que dit Tom Mueller : «Les bénéfices [de la fraude d’huile d’olive] sont comparables à ceux du trafic de cocaïne, sans les risques. »
C’est très logiquement que l’huile d’olive frelatée se retrouve dans bien des produits : en fait des centaines de produits contiennent de l’huile d’olive, qui est un produit très polyvalent. Au Québec, il a été estimé qu’environ 20 % de ces produits contiennent autre chose que l’huile d’olive annoncée. Dans certains cas, le contenu en huile d’olive ne dépasse pas 40 % : à la place, on a trouvé des résidus de branches, de noisettes (3) ou de feuilles, différentes huiles végétales (tournesol, colza, soja) bien moins chères. On y a même trouvé divers produits chimiques allant du savon au solvant.
De quoi faire peur car cela peut poser des problèmes d’allergie ou de santé non négligeables ! (4)
En France, où la consommation d’huile d’olive dépasse très largement la production nationale (100 000 tonnes contre 4 500 tonnes (6)), l’une des fraudes les plus fréquentes consiste en l’incorporation d’huile de grignons d’olive à l’huile vierge. Les huiles importées concurrencent souvent les huiles françaises, de qualité et plus chères, et parfois en les contrefaisant, notamment sur les marchés de Provence. Heureusement, on dispose maintenant de moyens réglementaires et techniques pour déceler les huiles de pauvre qualité mélangées aux bonnes.
Les vendeurs d’huile d’olive, tous pourris ?
Non, bien sûr. Il faut juste savoir que le marché de l’huile d’olive « manufacturée » obéit à des règles dont le consommateur doit être conscient pour savoir ce qu’il achète :
Les huiles d’olive les plus courantes en grande distribution sont des huiles dont l’origine et l’année de récolte ne sont pas indiquées. Pourquoi ?
1. Les industriels mélangent différentes huiles provenant de différents pays pour en faire un “mélange” destiné à l’exportation. Un peu comme si on embouteillait un vin qui soit un mélange de 3 ou 4 vins d’origine différentes. Ce n’est pas illégal : la fraude vient du fait qu’on ne dit pas au consommateur qu’on a utilisé des huiles de qualité inférieure et qu’on fasse passer le mélange pour « un grand cru ».
2. L’huile d’olive est un produit qui vit et qui, contrairement au vin, se détériore avec le temps. Dans une huile d’olive très récente, fraîche, l’amertume est plus prononcée, ce qui lui donne souvent son ardence, c’est-à-dire un côté poivré et piquant synonyme de qualité. Une huile plus vieille a des arômes moins prononcés. Les industriels s’en tirent donc en mélangeant 2 années de production afin de niveler le goût de l’huile… pas toujours en le déclarant.
Conclusion : pas de panique, on peut trouver des huiles d’olive de qualité en France. Il suffit de suivre quelques conseils pratiques pour la choisir en fonction des sigles et labels (IGP, AOC, AOP, DOC, Origine UE) et ensuite pour la conserver dans de bonnes conditions.
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A suivre > Comment choisir son huile d’olive
(1) Enquête publiée en janvier 2012 dans le quotidien La Repubblica.
(2) Stefano Masini, membre de Coldiretti, la principale organisation agricole italienne.
(3) Dans un rapport de 2001, l’Union écrivait déjà : « Les imprécisions subsistant quant à la spécificité des différents types d’huile d’olive risquent d’éroder la confiance des consommateurs ».Euphémisme.
(4) L’huile de noisette est souvent utilisée pour fraude car sa composition chimique, très proche de celle de l’huile d’olive, la rend la fraude difficile à détecter. Cependant plusieurs méthodes d’analyse ont été développées ces dernières années.
(5) L’adultération de l’huile d’olive (par de l’huile de noisette ou autre) peut entraîner un risque potentiel pour les personnes allergiques (ARLORIO, M., COISSON, J.D., BORDIGA, M., et al.Olive oil adulterated with hazelnut oils : simulation to identify possible risks to allergic consumers. Food additives and contaminants : Part A, 2010, vol.27)
(6) Le grignon est le produit résiduel de la pâte d’olives après extraction de l’huile, en quelque sorte du « tourteau ». L’huile de grignons d’olive est une huile raffinée, mélange d’huile obtenue à partir de ce résidu et d’huiles venant directement des olives.
(7) La production d’huile d’olive en France a représenté 4500 tonnes en 2005.