L’abattage massif des bouquetins du Bargy, en Haute-Savoie, aura bien lieu. Ainsi en a décidé le tribunal administratif de Grenoble. Saisie par plusieurs associations de l’environnement, la justice a refusé de suspendre l’arrêté préfectoral autorisant d’abattre des représentants de cette espèce animale dans cette zone, dont 40 % sont atteints par la brucellose.
Reblochons contre bouquetins
La brucellose, ou « fièvre de Malte » est une maladie due à une bactérie atteignant essentiellement les ruminants, dont les bouquetins. Elle se transmet aux ruminants domestiques, comme les bovins, par contact direct. L’homme peut être infecté en cas d’ingestion d’aliments contaminés (lait ou produits laitiers non pasteurisés), tandis que les cas de transmission interhumaine sont exceptionnels. En 2012, deux adolescents avaient ainsi été contaminés, un cheptel laitier avait été euthanasié et des stocks de reblochons contaminés avaient été détruits dans toute la France. Un risque sanitaire mais aussi économique que le préfet de Haute-Savoie, Georges-François Leclerc, a décidé d’anticiper en prenant la décision d’abattre les bouquetins, contaminés ou non.
Un risque sanitaire et économique anticipé par le préfet
Seuls un noyau sain de 75 bêtes doit être en effet épargné. De quoi provoquer la colère des associations animales alors que 70 bouquetins ont déjà été abattus et que 200 à 250 autres doivent l’être, qu’ils soient atteints par la brucellose ou non . « Il n’est pas question non plus de laisser une épée de Damoclès sur le monde agricole qui sort déjà d’une crise, a balayé le préfet, interrogé dans le Parisien. Il n’y a pas d’alternative à l’abattage immédiat des bouquetins malades. La vaccination n’est pas une solution viable. Et puis il faudrait capturer les animaux un à un, ce qui, sur un terrain très montagneux, peut faire courir des risques aux agents de l’office de la chasse. »
Brigitte Bardot et la fondation Nicolas Hulot montent au créneau
Un pourvoi en cassation est déjà prévu par les défenseurs de la cause animale, qui proposent plutôt d’endormir les animaux, de dépister la maladie et de vacciner les bouquetins sains ou d’euthanasier les malades. Début octobre, Brigitte Bardot avait réclamé la grâce présentielle pour les bouquetins, tout en dénonçant ce « massacre ». Dans un communiqué, la fondation Nicolas Hulot a pris acte de la décision du tribunal administratif de Grenoble tout en demandant la suspension de la chasse aux bouquetins et en espérant que Ségolène Royal « prenne d’urgence une initiative de médiation pour remettre tout le monde autour de la table, retrouver le sens du dialogue et élaborer des solutions de compromis acceptables pour tous ».
Un risque de transmission à l’homme quasi-nul
« Des points d’accord existent déjà (sur la nécessaire éradication de la brucellose, sur l’euthanasie des animaux séropositifs), peut-on également lire dans le communiqué. Il faut trouver des convergences sur les autres aspects pour élaborer une alternative qui convienne à tous. » En juillet dernier, un rapport de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire) soulignait que « le risque actuel de transmission de la brucellose aux cheptels domestiques est estimé, par les experts, comme quasi-nul à minime », alors que le risque de transmission à l’homme est « quasi-nul ». Plutôt que l’abattage total, très compliqué dans cette zone montagneuse, l’Agence proposait plutôt des mesures sur plusieurs années pour éviter la propagation de la maladie (euthanasie sélective, vaccination, surveillance…). Des propositions qui n’ont pas reçu un écho favorable pour l’instant.
Illustration bannière : Vie sauvage, un bouquetin dans les Alpes – ©Maksim Fesenko Shutterstock