L’agriculture productive est, comme son nom l’indique, une agriculture qui produit suffisamment pour nourrir tout le monde, pour nourrir toute la Planète et qui est rentable. De nouvelles études montrent les bénéfices pour l’Europe de maintenir et à renforcer une agriculture à forte capacité productive. Mais cela ouvre le débat.
Peut-on imaginer une agriculture productive qui évite les abus de l’agriculture industrielle ? L’agriculture productive, doit naviguer entre les dérives de la production industrielle, trop polluante, et l’agriculture bio, trop chère et pas assez répandue. Pas simple mais les enjeux sont énormes ! Faut-il pour autant l’opposer à une agriculture plus écologique, voire bio ?
Comment nourrir 9 puis 13 milliards d’individus ?
Comment calculer la production nécessaire pour nourrir chaque habitant de la Planète quand on sait que la demande énergétique à satisfaire chaque jour pour chaque humain est de 1.8 million de kilocalories par an ?
Il nous faut nous poser une question préalable pour répondre :.
- Quel est le point commun entre les oeufs, le steak et les toasts que l’on trouve dans son assiette ?
Eh bien pour chacun de ces aliments, une forte production de céréales (et d’eau virtuelle) aura été nécessaire.
En effet, il aura fallu nourrir des poules avec des graines pour qu’elles pondent des oeufs, nourrir les boeufs avec des céréales pour obtenir de la viande et fabriquer de la farine à partir de céréales pour confectionner du pain.
Ainsi, l’un des moyens permettant de calculer la quantité de nourriture à produire pour nourrir la planète entière est l’indice d’équivalent céréales.
Un être humain a besoin de 200kg d’équivalent céréales par an.
Aujourd’hui, nous produisons à l’échelle mondiale 330 kg d’équivalent céréales par habitant et par an, soit suffisamment pour nourrir 12 milliards d’individus. Nous produisons donc largement assez de nourriture sur Terre pour satisfaire les besoins de tous, notamment de la majorité de la population qui vit désormais dans les villes. (Un point sur l’urbanisation de la planète).
Alors, pourquoi 1 milliard de personnes souffrent de la faim dans le monde ?
Famines et disettes sont encore fréquentes dans nombre de pays. Plus de 850 millions d’êtres humains ne mangent pas à leur faim.Le modèle agricole dominant reste encore l’agriculture manuelle, sans machines ni tracteurs, sans animaux de trait.
Parmi les coupables, le gaspillage alimentaire : dans les pays du Nord, 1/3 de la production de nourriture finit à la poubelle, soit 1,3 milliard de tonnes de nourriture. Le gaspillage alimentaire des pays riches représente quasiment autant de nourriture (222 millions de tonnes) que toute la production alimentaire nette de l’Afrique subsaharienne (230 millions de tonnes).
Dans les pays du Sud, la demande alimentaire continue à exploser tandis que le gaspillage alimentaire continue à annihiler une grande part des efforts de production.
Le rôle de l’Europe, paradis agricole menacé
L’Europe, en tant que zone agricole ultra productive, a un grand rôle à jouer dans le bien-être alimentaire mondial. Mais pour cela elle va devoir entreprendre quelques changements. Comment ?
La dégradation des terres agricoles
Tout d’abord préserver son patrimoine, c’est à dire ses terres cultivables, menacées de toutes parts, y compris en France, notamment par la pollution et par le grignotage urbain.
L’urbanisation entraîne un grignotage continue des terres arables agricoles qui s’ajoute à la dégradation générale des sols. En France, on estime que 82 000 hectares de terres agricoles sont perdues chaque année. Au total, les zones artificialisées (goudronnées, construites…) occupent 4,9 millions d’hectares en 2010, soit près de 9 % de la Métropole.
L’agriculture productive, c’est quoi ?
L’agriculture productive répond au besoin d’intensification de la production végétale tout en respectant des fonctions vitales de l’écosystème et des sols.
Le but de l’agriculture productive, pourtant souvent grosse utilisation de produits phytosanitaires, est simple : nourrir tout le monde. Mais à notre époque, elle doit impérativement faire en sorte que produire plus soit compatible avec produire mieux.
C’est une méthode appliquée aujourd’hui par des milliers d’exploitations agricoles en Europe qui veulent produire plus mais avec moins d’intrants chimiques (pesticides, engrais phytosanitaires) sans pour autant être capable de passer au Bio (pour l’instant ?). La qualité de leurs sols s’améliore, leurs rendements progressent avec des pratiques plus douces pour l’environnement.
Notre avenir alimentaire se joue aussi en ville
L’agriculture urbaine de sujet marginal, est en passe de devenir un vrai enjeu.
On ne sait pas encore quelle place elle pourra réellement tenir dans nos assiettes. Mais la ville est clairement un espace où l’agriculture productive, encore souvent aux mains d’amateurs éclairés ou de particuliers, va pouvoir s’exprimer et démontrer tout son intérêt.
Pour représenter autre chose qu’une production anecdotique de quelques aromates ou plants de tomates, l’agriculture productive urbaine va devoir conquérir des espaces plus nombreux et mieux structurés.
Les jardins partagés, jardins ouvriers et autres jardins municipaux en seront les vecteurs majeurs, bien plus que les balcons ou terrasses. ?
La culture en ville – du fait de son manque d’espace, de ses pollutions – devient ainsi le symbole d’une mutation économique, où la production est plus locale, plus écologique et capables de nourrir les hommes mais aussi le rêve d’une ville différente.
Ceux qui nous nourrissent ne peuvent pas se nourrir eux-mêmes.
Une récente étude menée par un think tank basé à Berlin plaide en faveur de l’agriculture productive comme une solution pour répondre aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux de l’agriculture. L’agriculture productive apporterait sécurité alimentaire, efficacité des ressources et stabilité économique tout en préservant la biodiversité et en limitant le réchauffement climatique.
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