Le Monde – Consommer écoresponsable. Oui, mais…

Rédigé par Consoglobe, le 3 Apr 2012, à 17 h 16 min
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Christophe Guériteau, bientôt 43 ans, en a marre du marketing vert : « En famille, nous trions tout. Mais je me sens un peu « vache à lait » avec le développement durable », explique cet informaticien en reconversion. « J’ai trouvé des ampoules basse consommation à 7 euros l’unité ! Temps d’utilisation inférieur aux lampes à incandescence ; agents polluants à l’intérieur. J’ai un doute concernant le bilan pour la planète. En pleine crise, le marketing fait du vert sur tout, et… les prix s’envolent. »

A 23 ans, Flavien Pobelle, étudiant à Angers (Maine-et-Loire), n’est, lui, pas convaincu par la démarche vertueuse individuelle. « L’écologie est une chose importante à l’échelle mondiale, mais ce sont les pays les moins pollueurs qui font des efforts. Les plus problématiques (Russie, Etats-Unis et Chine) n’ont pas pris de mesures, rendant inutiles les efforts de l’Union européenne. A mes yeux, ces mesures freinent l’économie française. »

Atypiques, Christophe et Flavien ? Au contraire. Ils illustrent la diversité des nombreuses réponses obtenues à l’appel « Réfractaires au développement durable, témoignez », lancé fin mars sur Lemonde.fr. Alors que se tient, du 1er au 7 avril, la 10e Semaine du développement durable, un « écolo-scepticisme » s’est installé en France. Le phénomène est en progression. 45 % des 4 500 Français sondés en juin 2011 par l’Ipsos trouvent « qu’on en fait trop sur le réchauffement climatique » (tout à fait d’accord 11 %, plutôt d’accord 34 %). Cette proportion d’écolo-sceptiques n’était que d’un tiers en 2008. « Les gens ont eu peur, mais ont de moins en moins peur », résume Rémy Oudghiri, directeur du département tendances.

Jean-Marie Boucher, fondateur du site vert Consoglobe.fr, confirme la tendance. « Entre un quart et un tiers de la population est touchée par cette écorésistance », estime-t-il. « En 2007, avec l’effet d’euphorie lié au succès du film d’Al Gore (« Une vérité qui dérange », documentaire sorti en 2006), il était mal vu de n’être pas écolo. L’infléchissement du comportement a eu lieu en 2009. Une certaine écolassitude est apparue », se souvient-il. Cette année-là, le sommet pour la planète de Copenhague accouche d’une souris. « Une partie des consommateurs a alors fait son coming out. Sur le site sont apparus des messages parlant de complots industriels pour consommer des produits verts », poursuit M. Boucher. « Cette écorésistance s’est ensuite accentuée avec la crise. » Résultat : Consoglobe.fr a gommé les slogans trop militants : « Nous ne disons plus que le troc, que nous proposons en ligne, est bon pour la planète, mais plutôt pour le porte-monnaie », reconnaît-il.

Il y a un an, le cabinet Ipsos a été surpris par un sondage réalisé après la catastrophe de Fukushima. « Nous avons demandé : quels sont les critères importants pour déterminer la politique énergétique future de la France ? » se souvient Etienne Mercier, directeur adjoint du département opinion. Les résultats révèlent alors de nouvelles tendances. « Le respect de l’environnement reste prépondérant (61 %) aux yeux des Français. Mais il perd 10 points en deux ans, alors que 42 % choisissent le prix du kilowattheure, en hausse de 15 points depuis 2009. » Même dans un contexte de catastrophe environnementale, « le pouvoir d’achat prévaut de plus en plus face à l’environnement », conclut cet observateur.

Bien sûr, les déclarations d’intention de bonnes pratiques sont toujours là. Selon 88 % des Français, « la crise économique devrait être une occasion de revoir nos modes de consommation » (Ethicity/Kantar Media/TNS Sofres ; 4 500 sondés en mars). Et « 73 % se disent prêts à éteindre les appareils en veille, 62 % à utiliser des produits d’entretien verts, 50 % à baisser le chauffage, 35 % à choisir vélo plutôt que voiture » (Ecover-TNS Sofres ; 1 016 sondés en mars).

Mais, dans les faits, la consommation énergétique des ménages ne cesse d’augmenter. « Le nombre de téléviseurs et autres appareils technologiques se multiplie dans les foyers, explique Rémy Oudghiri. La modération se pratique sur fond d’hyperconsommation et même les effets d’un comportement modéré et sincère se trouvent neutralisés. Renoncer n’est pas aisé. » D’autant plus qu’en période de crise « un nombre croissant de consommateurs aspirent à des moments de plaisir ».

Laure Belot

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